Posts Tagged ‘agression sexuelle’

Je vais pique-niquer avec mon église le jour de la F1

juin 10, 2017

Pendant le weekend du Grand Prix, je joue une partie de balle-molle, je me rends à un anniversaire pour enfants et à un pique-nique organisé par ma paroisse. Selon les groupes contre le travail du sexe, réagissant à mes articles sur le travail du sexe et le Grand Prix, je suis plutôt en grande période de sollicitation pour me faire payer à parler moteurs et condoms.

C’est faux. Comme toute l’hystérie entourant le Grand Prix, année après année. Les journalistes ne changent pas de topo, malgré le fait que les policiers s’ajustent et indiquent qu’aucun cas de mineures ou de personnes exploitées sexuellement n’a été prouvé l’an dernier, dans le cadre de cette fin de semaine de célébration.

L’exploitation sexuelle, c’est grave. Et ça existe pour vrai. Lorsqu’on invente des faits, au lieu de se baser sur des données disponibles, on fait énormément de tort aux travailleuses du sexe et aux personnes qui sont réellement exploitées.

À lire absolument pour vous donner une idée juste de ce qu’est le travail du sexe pendant le Grand Prix:

1.Mon expérience comme escorte au Grand Prix

Extrait: »J’ai tenté de trouver une explication à mon impopularité soudaine: peut-être que la proprio de l’agence n’avait pas assez dépensé en publicité? Peut-être aussi que les clients préféraient se masturber dans des pots d’échappement? »

2. Montréal se transforme-t-elle vraiment en bordel pendant la F1?

Extrait: »Ce que je n’avais jamais prévu, c’est qu’un client que j’avais vu au moins trois fois avant me viole pendant le Grand Prix. Il m’a violée chez lui. Je voulais pas baiser une deuxième fois avec lui et il m’a poussée. Il m’a baisée par terre, sur un drap sale. J’ai pas pris ma douche chez lui. »

3.Qui fait le plus d’argent pendant le Grand Prix?

Extrait: »Marilyne raconte que son unique expérience en lien avec le sport a été de donner une fellation pendant un match de la demi-finale de la coupe du monde. « C’était devant la télé et ça faisait débander mon client, d’ailleurs», rigole-t-elle. Myriam dit que lors d’évènements sportifs, elle n’a que les clients habituels. Elle est plus populaire pendant les grands salons, « des putains de nids à clients », comme les congrès en immobiliers et en ingénierie.  »

Bon weekend y’all! Je vous souhaite du soleil, des baisers saveur pina colada et stay strong fellow sex workers de mon coeur.

Ils fantasment pas sur une jupe portefeuille

février 7, 2017

rapist-rape-people

Quand j’avais dix-sept ans et que je revenais de l’anniversaire d’une copine à qui j’avais donné des sacs à surprises Ardène pour ses dix-huit ans, un mec m’a suivie en auto. Il s’est crossé en ralentissant près de moi. Je suis allée dans l’entrée d’une maison et j’ai fait semblant de chercher mes clés. Deux minutes plus tard, la même auto s’arrêtait près de moi et le mec me touchait la cuisse. J’ai couru et sonner à une maison au hasard et un professeur d’éducation physique m’a répondu et m’a ramenée chez moi. J’ai téléphoné les policiers sans parler trop fort parce que je ne voulais pas déranger mes parents.

Les policiers m’ont regardée, dans la salle à manger de mes parents, et m’ont demandé si je portais la même chose maintenant que lorsque j’avais quitté la demeure de ma copine. J’étais en camisole noire avec un personnage de bande dessinée dessus et en jupe portefeuille orange. Vraiment affreuse mais vraiment mini.

Quand je vivais dans un demi sous-sol près du métro Langelier et qu’un mec m’avait montré sa queue pendant que je faisais la vaisselle, les policiers m’ont demandé aussi ce que je portais.

J’étais en nuisette et j’étais chez moi et je ne m’étais pas non plus changé avant l’arrivée des policiers, parce que j’avais rien à cacher. Les assiettes sales empilées les unes sur les autres m’embêtaient bien plus que ma nuisette satinée.

J’étais épuisée et sale et je portais les mêmes vêtements depuis genre trois jours quand je me suis faite agressée sexuellement. Les violeurs s’en fouettent des vêtements. Le mien était triste et ne m’avait plus pour lui alors il voulait me ravoir et ne plus être triste ou me partager sa colère ou souhaiter je ne sais pas quoi quand il m’a prise de force. Les violeurs s’en fouettent des vêtements.

Dénoncer larmes, agressions et humiliations

février 5, 2016

valium

collage par Valium

Lundi, Tanya St-Jean, une des créatrices du site Je Suis Indestructible, est allée parler du mouvement #AgressionNonDénoncée, un mouvement déclenché suite aux révélations sur Jian Ghomeshi. La première journée du procès de Jian Ghomeshi aurait été un bon moment pour revenir sur les avancées du mouvement, sur ce que ça signifie, dénoncer ou ne pas dénoncer.

Son entrevue a été diffusée sur les ondes de RDI et Radio-Canada.

Elle tenait à parler de la difficulté à porter plainte. Elle tenait à parler de la culture du viol. Elle tenait à parler de la peur.

Elle a parlé de tout ça. Mais ses observations ont été coupées. RDI et Radio-Canada ont gardé ses larmes.

Les victimes, dans les médias de masse, ne seraient intéressantes que si elles pleurent, si elles relatent leurs agressions, leurs histoires d’horreur ? Leurs propos brillants, leur questionnement par rapport à ce qui est banalisé, oublié, caché, tchop tchop, coupés ?

Pas de sensibilisation si on réussit à trouver une tournure sensationnaliste à tout témoignage ?

Valium 3

collage par Valium

Suite à la diffusion de son entrevue, Tanya St-Jean a tenu à exprimer son malaise et sa colère face à ce que la télévision a projeté d’elle et de ses idées. Sur sa page Facebook personnelle, voici ce qu’elle a écrit :

« j’aimerais rectifier un point – qui vaut de l’or pour moi – quant au reportage diffusé hier soir sur les ondes de RDI et Radio-Canada. (car je suis un peu fâchée, oui.)

ceuzes qui me connaissent par coeur, savent que je ne parle JA-MAIS de mes agressions.

pourquoi ? car ce n’est pas de moi dont il est question, mais de nous tous, survivantEs de violence à caractère sexuel. et c’est tout simple à expliquer : quand on demande à des membres de l’équipe de Je suis Indestructible d’être en entrevue afin de discuter d’actualités reliées au sujet de l’agression sexuelle, l’essentiel c’est de parler de notre mission et de nos observations.

mais c’est avant tout de donner la parole aux autres, de créer un espace sécuritaire – oui, ceci sonne encore utopique – pour les survivantEs d’agression sexuelle.

l’entrevue d’hier me démontre sensible, brisée… on a prit mes larmes, on me les a volées pour faire couler du sensationnalisme spectacle à la télé nationale.

j’ai discuté avec la journaliste un bon 15 minutes avant d’en arriver à ses fameuses questions « Vous avez été agressé vous aussi ? Dénonceriez-vous vos agresseurEs? Vous aviez quel âge? »

menstruée, émotive et nerveuse, j’ai été pris de court.

mais pendant le 15 minutes de conversation qui précède, j’ai discuté énormément du manque de confiance envers le système judiciaire qui s’observe dans nos témoignages reçus depuis plus de deux ans. j’ai tenté de l’expliquer, en parlant de culture du viol qui se voit banalisée quotidiennement dans nos médias, dans notre environnement social, notre famille, nos amiEs, au travail, à l’école. j’ai parlé de ce maire resté en poste sur la Côte-Nord, de ce juge de la cour fédérale, de ce policier, des campus universitaires… j’ai parlé du doute, de la peur de ne pas être cruE et comprisE lorsqu’on dévoile son histoire d’agression.

j’ai aussi énoncé des statistiques, sur la mouvance des mots-clic ‪#‎BeenRapedNeverReported / ‪#‎AgressionNonDénoncée et l’impact que celle-ci a eu sur notre implication.

à la question « Pourquoi peu de victimes dénoncent leur agresseurs?”, j’ai tenu à maintes reprises à souligner que c’est un processus qui peut s’avérer aussi violent que l’agression elle-même et qu’encore plusieurs lacunes existent quant à l’accompagnement des victimes dans ce cheminement.

j’ai parlé de ressac anti-féministe, de ces manifestions violentes qui s’acharnent à chaque prise de parole.

j’ai aussi expliqué la mission de Je Suis Indestructible et l’impact positif que ce projet a eu dans la vie de plusieurs personnes, de cette grande famille de gens qui ne se connaissent pas mais qui portent le même combat.

bref, j’ai fait beaucoup plus que verser quelques larmes égocentriques, coincée dans un coin par une journaliste.

une leçon qui m’apprend – encore – que trop souvent, les médias prennent bien ce qu’ils veulent dans une entrevue. et ce, même s’ils nous convoquent afin de parler de tout sauf ce qui transparaît à la tévé.

je tiens par exemple à vous dire MERCI. merci pour vos doux mots pis l’amour dans mon inbox depuis hier, toute la nuit, tout le matin. j’ai aussi parlé que JSI m’avait outillé à devenir cette jeune femme forte… et, c’est chacun de vous, ça.

des fois, comme lala, je trouve que « Ensemble, brisons les chaînes du silence! » prend tout son sens.

vous êtes magnifiques, et tout aussi inspirantEs et fortEs que moi, comme vous me le dites. ne l’oubliez jamais ok?

#‎lamadameestfachéecrissecul

‪#‎lamadamequivousaime »

résilience par valium

collage par Valium

Quelques jours après, Tanya St-Jean a remarqué que même les organismes contactés par les médias populaires ne recevaient que des questions sans relief, tel que avez-vous vu une augmentation de fréquentations de vos centres d’aide ?

L’important ce n’est pas l’augmentation. C’est froid, comme question, c’est un chiffre, un pourcentage, ça révèle ce que ça révèle, sans rien approfondir. Tanya St-Jean se demande pourquoi n’est-il pas possible de parler franchement de culture du viol, de prévention, de sensibilisation.

Roxanne Guérin, aussi une des instigatrices de Je Suis Indestructible, a réussi à en discuter avec l’équipe de Vice. Elle a également fait remarquer à quel point il peut être difficile pour les victimes d’agressions sexuelles d’obtenir justice.

Récemment, une amie, victime, tout comme quatre autres femmes, d’un homme les ayant agressées violemment, m’a confié son désarroi et sa colère devant la sentence que son agresseur avait finalement reçue. Ce dernier avait plaidé coupable et son avocat avait plaidé que le viol était dans les mœurs de son pays d’origine, le Congo. Une telle banalisation a surpris mon amie.

Elle s’est sentie d’autant plus impuissante quand elle a su qu’elle n’avait aucun rôle sauf celui de la victime. La Couronne ayant conclu une entente avec la défense, seul le chef d’agression sexuelle était conservé, puisque l’accusé avait accepté de plaider coupable. Laisser de côté les autres chefs, c’était plus que frustrant, c’était violent, pour mon amie. Pour elle, c’était comme si sa séquestration et les autres abus qu’elle avait vécus étaient à oublier, impossibles à croire, pas importants pour personne sauf pour elle.

Valium 2

collage par Valium

Rien n’est facile à oublier. Rien n’est simple dans une agression, ni dans ce qui en suit. Et si les médias n’en parlent pas, et si les victimes se sentent désoeuvrées, humiliées par un système qui se doit de les protéger, qu’est-ce qu’il faut en penser ? Comment réagir face à ceux qui ne croient pas les femmes qui osent dénoncer ? Comment réagir face à un agresseur reconnu qui garde sa position de maire ? Ce n’est pas des larmes qu’il faut montrer. Ce sont des mots qu’il faut entendre. Et répéter.

Fantasme incertain

juin 29, 2015

Certaines annonces sur Craigslist font particulièrement peur.

« Basically, I’ve always dreamed of doing a « pretend » rape.

It wouldn’t be 100% sure though. You’d give me a block of 4-5 streets or so around your place you’d take a walk in, a recent picture of you and I’d have to find you and follow you home. You’d leave the door unlocked for a bit (maybe long enough for a shower or something?). If I manage to find and follow you home, i’ll come in and take advantage of you, otherwise, I’ll go home…

  • Aucune sollicitation »

(Ok j’avoue j’étais sur Craigslist parce que je voulais voir si le lait maternel était encore so hype comme potion chez les sportifs.)

Polo Leflic et Mélodie Nelson

mai 24, 2015

Quand j’ai écrit Ne pas se plaindre, j’ai reçu de nombreux témoignages d’amies et d’inconnues qui avaient été victimes d’une agression semblable, qui n’avaient rien dit, ou qui étaient allées jusqu’au tribunal, en parler répéter les dates les lieux leur âge leur lien de parenté ou d’autorité ou d’amitié se faire confronter par d’autres avocats répéter répéter pour ne plus se sentir folle honteuse coupable coupable, coupable de rien, sauf d’avoir un trou.

Puis, j’ai reçu un courriel, avec des fautes, un courriel de quelqu’un qui se prétend un ex flic.

J’ai répondu au courriel, sans comprendre vraiment les intentions de la personne qui me l’avait envoyé. Puis, un échange de courriels, plus articulés, plus détaillés, avec moins de fautes, un échange de courriels a eu lieu. Ce qui m’a laissée plus que songeuse, presque apeurée. Je ne sais pas qui m’envoit ce courriel, qui utilise le terme flic au lieu de policier, qui préférerait me voir plutôt que de me donner simplement son identité, vérifiable, qui préfère se cacher plutôt que de dire ce qui est vrai, je ne sais pas si c’est juste un creepy guy ou une creepy girl qui m’écrit, ou si c’est plus que ça, si c’est possiblement mon agresseur qui m’écrit et ça me fait chier de rester avec ça au travers de la gorge, de me demander ce que recherche la personne qui m’écrit, me troubler, en savoir plus me faire cracher stresser des cauchemars.

Je vous dévoile les courriels car la personne qui m’écrit dit connaître d’autres victimes. Je ne serais alors pas la seule personne avec qui il aurait communiqué. Si quelqu’un a déjà eu une correspondance avec ce Polo, je souhaiterais le savoir. Merci.

Date: Fri, 15 May 2015 14:46:36 -0700

Subject: Ne pas se plaindre

From: pololeflic@gmail.com

To: melodienelson@hotmail.com

j ai lu votre article et je suis troublé. J aimerais en discuter si vous en avez envie . Suis un ancien flic et victime. J aurais probablement des choses à partager. C est comme vous désirer.

Polo

Ma réponse :

Bonjour,

Je ne sais pas quoi vous dire. Je suis désolée de vous savoir victime. Si vous préférez, vous pouvez utiliser un autre terme, comme survivant, comme le font les personnes qui ont créé le site Je Suis Indestructible. Vous connaissez? Vous pouvez me confier ce que vous voulez, mais je n’ai pas de compétence reliée à ça (je ne suis pas thérapeute, je ne peux pas conseiller quoi que ce soit). Je partage mon vécu, c’est tout, ça peut aider mais aussi éveiller chez certaines personnes un rappel d’événements passés. Comme on m’a dit, suite à cet article, ce n’est pas dans l’oubli qu’on se construit. C’est à travers les souvenirs, et ce que nous en faisons, que nous réussissons à nous construire ou à nous reconstruire.

Juste une chose: vous mentionnez être un ancien flic. Je ne sais pas si ça a un lien avec ce que vous voulez me partager, mais je tiens à dire que je ne changerai pas d’idée concernant une plainte. Ne m’écrivez pas pour me convaincre du contraire. À chacun sa démarche. Moi, je n’ai pas choisi de faire de plainte. Je ne crois pas que ça m’aurait m’aidée. Je crois que pour de nombreux cas d’agressions sexuelles, beaucoup de survivants souhaitent un système de justice parrallèle, une prise de conscience, surtout.

Cordialement,

Mélodie Nelson

Date: Sun, 17 May 2015 21:46:57 -0400

Subject: Re: Ne pas se plaindre

From: pololeflic@gmail.com

To: melodienelson@hotmail.com

Bonsoir Mélodie , merci de me répondre, ne soyez pas désolé, je vais bien.

Je voulais juste reprendre des citations de votre texte.

«Tu es capable de parler de lui, mais moi, je ne veux plus entendre parler de lui.»

Plus les années vont passer, plus vous allez en entendre parler, plus ce sera pénible.

«Il m’a aussi baisée même si je lui ai dit que je ne voulais pas.»

Il reviendra vous êtes sa proie, tant que vous ne lui aurez pas fait face, il sera le prédateur.

Mon copain n’a pas compris pourquoi

« Mais ce n’est pas ça, ce n’est pas que j’accepte tout. C’est que je préfère oublier, parfois, et que lorsque je n’oublie pas, j’ai mal d’être ce que je suis, forte et faible et fière et souillée, une fille qui sait très bien qu’elle ne pourra jamais raconter ses jambes et ses fesses, écartées, les mains de l’autre, le sexe de l’autre, un autre que j’ai aimé, et qui m’a aimée, et c’est difficile de le connaître, de l’avoir connu doux et réconfortant et menteur et violeur. J’ai mal de savoir que je resterai toujours une fille, une ex escorte, une fille qui aime se faire traiter de salope, qui aime trop ça pour être crue, peut-être, lorsqu’elle parle d’agressions. »

Vous n’arrivez jamais à oublier, malgré thérapie, médicament, dépression, alcool, drogue. Cela fera partie de vous. À tous les fois qu’il sera à la tv, en promotion radio vous aurez des bouffés de douleurs.

Vous parlé de justice réparatrice, vous devez l’affronté, il doit payer au moins les frais que cela va vous occasionner et croyez-moi il y en aura.

En plus, pensez qu’il y a d’autres victimes ….. qu’un jour si un malheur arrivait à l’une d’elles vous seriez doublement dans la douleur.

C’est un long processus , croyez-moi.

Si vous voulez en discuter, je demeure disponible pour vous aider. Il n’y a pas juste la police dans la justice réparatrice 🙂

Avec respect, prenez le temps d’y réfléchir

@+

Polo Leflic.

Ma réponse :

Bonjour Polo,

Pourquoi mon texte vous a tant touché? Je sens une certaine empathie, mais je me demande pourquoi. Il y a beaucoup de filles qui vivent ce que j’ai vécu. Vous travailliez auprès des victimes d’agressions, quand vous étiez policier?

Sinon, pour vrai, je ne peux pas envisager mes réactions face à lui. Ce n’est pas une simple aggression; c’était dans le contexte d’une relation. Je ne le déteste pas. Je ne pense pas que ce sera plus pénible avec les années. Au contraire, j’ai écrit ce que j’avais à écrire, je me suis confié, pour moi, de l’avoir écrit, c’est suffisant pour me sentir mieux.

Pour le terme de proie, je crois pas. Pour moi, ce ne sera jamais tout blanc ni tout noir. Je ne l’ai pas connu que comme ça.

J’avais commencé à vous répondre avant de lire complètement votre courriel, une habitude, bonne ou mauvaise, et là, je l’ai lu au complet et je suis un peu distraite par ce que vous supposez. Que connaissez-vous de moi? Et de lui? Nous connaissons-nous, vous et moi? Merci de ne pas jouer, je n’aime pas trop les jeux, les complications et tout.

Mélodie

Date: Mon, 18 May 2015 08:40:59 -0400

Subject: Re: Ne pas se plaindre

From: pololeflic@gmail.com

To: melodienelson@hotmail.com

Votre texte me touche, parce que c’est un cri du cœur. Disons que j’ai de l’expérience en matière d’agression sexuelle et je suis effectivement empathique aux victimes et intransigeant face aux prédateurs, brave personne qui détruit femme et enfant sur leur passage.

Je ne joue pas de jeu, je n’aime pas ça moi non plus. Je ne vous connais pas, mais je suis sur la traque d’un cowboy français, brave personne, qui a fait d’autres victimes et qui ont tous peur de dénoncer pour toute sorte de bonnes ou mauvaises raisons. Je connais trop bien le phénomène.

Votre agresseur est menteur et violeur comme vous le dites. Il ne changera pas. Il manipule aisément. Tôt ou tard vous devrez l’affronter, c’est des agressions répétées même dans un contexte de relation. Écrire ou confier malheureusement ne sera pas suffisant. Je suis certain que vous pouvez me décrire avec exactitude, la température, l’endroit , la lumière, l’odeur bref tous vos sens ont incrusté chaque moment dans votre cerveau. Le fait de ne pas en vouloir à son agresseur est un signe. Le jour où vous lui en voudrez, ce sera le premier pas vers une guérison ou du moins vous vous pardonnerez d’avoir été victime.

Je ne veux surtout pas vous importuner, si vous avez besoin d’aide, écrivez moi.

Avec empathie

Polo

Ma réponse :

Bonsoir,   Je vais cesser toute correspondance avec vous, car même si naïvement ou non, je crois vraiment en votre empathie, trop de choses me tracassent dans vos écrits.

1. Je ne connais pas votre identité. Vous pourriez être une femme, mon voisin, etc.

2. Vous me parlez d’un « cowboy français ». Vous faites un rapprochement possible en lui et moi, sans m’expliquer comment ça se fait que vous nous liez ensemble.

3. Vous me dites avoir été une victime, mais une victime de quoi?

4. Vous me dites que je devrais me pardonner, mais jamais je n’ai parlé de pardon. Je n’ai jamais ressenti que je devais me pardonner quoi que ce soit. Je ne suis pas honteuse de ce qui m’est arrive, et je sais très bien, hors de tout doute, que je n’ai rien à me pardonner.

5. Je ne connais pas plus votre en expérience en agression sexuelle, ça me semble flou et confus, mais je vais vous apprendre quelque chose: ce ne sont pas toutes les victimes qui vivent leur agression de la même façon. C’est gentil d’avoir voulu m’aider, je crois en votre volonté de bonté, mais je n’ai pas besoin d’aller plus loin.

Cordialement,

Mélodie Nelson

Date: Mon, 18 May 2015 21:27:07 -0400

Subject: Re: Ne pas se plaindre

From: pololeflic@gmail.com

To: melodienelson@hotmail.com

C est comme vous voulez, si vous changer d avis je suis disponible pour vous rencontrer et vous verrez qui je suis . Bonne soirée et désolé si je vous ai importuné ou tracassé, ce n était pas le but …..

Ma réponse :

Bonjour,

Je tiens à connaître votre identité. Je ne comprends pas en quoi une rencontre serait nécessaire juste pour que je sache qui vous êtes vraiment. Comment pourrais-je faire confiance aussi aveuglément à quelqu’un alors que nous connaissons tous des histoires de fausse identité sur le web (pensons au documentaire récent Profil Amina). Ça me tourmente en effet beaucoup, vos courriels, dont je ne saisis pas du tout encore les intentions.

Merci.

Ne pas oublier l’agression, mais oublier la honte

mai 7, 2015

Emma Sulkowicz

Photo d’Emma Sulkowicz, qui, suite à un viol dans sa chambre de résidence, a décidé de se promener avec son matelas, tant que son agresseur resterait impuni, encore sur le même campus universitaire qu’elle.

Cette semaine je parle de Bleu Nuit dans ma chronique Canoë. De film de softporn quasi artsy et d’héroïnes prêtes à baiser George Clooney et à slapper Sandra Bullock.

Mais la semaine dernière, ma chronique portait sur une relations entre deux handicapés de l’amour. Moi et un ex. Moi et un ex-qui-m’a-aimée-mais-aussi-agressée.

C’était la première fois que j’étais aussi claire sur le sujet : j’ai déjà trompé Alexandre Le Grand et le mec avec lequel je l’ai trompé, well, il m’a baisée sans mon consentement. Deux fois. Deux fois sur je-ne-sais-pas-combien-de-fois, mais deux fois, quand même.

Je n’irai jamais voir des policiers pour leur donner les détails, je ne veux pas revivre ça, l’amour et la manipulation et sa queue dans mon cul sans que je ne le veuille, la face sur son plancher de bois verni ou mes bras qui ne luttent pas, qui ne font que s’appuyer contre un lit, puis contre une commode, blanche.

Je l’ai raconté, quand même, parce qu’il fallait que je le dise, parce que c’est un mini geste de rien, de le dire, mais c’est bon, pour moi, de le dire, et c’est bon, pour les autres, de savoir qu’elles ne sont pas seules, et de se questionner toujours, sur la notion de consentement, que ce soit dans une relation amoureuse, amicale ou une relation de one night après une partie de bowling.

Des articles intéressants à lire sur le sujet des agressions sexuelles

Sur Madonna qui n’a jamais porté plainte ou le regret de porter plainte: 

« But then the detective began asking me about my virginity, my clothing choice and how strongly I resisted. Next, he pushed me to engage in a “pretext phone call,” in which I was to call the perpetrator and tell him I was pregnant. I was shocked at the suggestion. Not only was the officer directing me to lie about a pregnancy, he was asking me to speak to a man I never wanted to have contact with again. I had blocked the rapist’s number from my cell phone and was attempting – with the help of my attorney – to get a restraining order against him. During subsequent telephone conversations with the detective, he suggested that I was perhaps mistaking rough sex for rape. »

Sur le consentement sexuel : Deux Canadiens sur trois ne savent pas ce que signifient réellement le consentement sexuel.

Ma chronique:

« Mais ce n’est pas ça, ce n’est pas que j’accepte tout. C’est que je préfère oublier, parfois, et que lorsque je n’oublie pas, j’ai mal d’être ce que je suis, forte et faible et fière et souillée, une fille qui sait très bien qu’elle ne pourra jamais raconter ses jambes et ses fesses, écartées, les mains de l’autre, le sexe de l’autre, un autre que j’ai aimé, et qui m’a aimée, et c’est difficile de le connaître, de l’avoir connu doux et réconfortant et menteur et violeur. »

Choisir de parler de son viol pour briser la honte:

« What both these young women are doing, in very different ways, is insisting that sexual violence demands a response from wider communities. It is not something that victims should have to struggle with on their own, and it certainly isn’t something they should feel shame about. »