Je suis lente pour écrire. Je n’ai pas de raisons. J’ai des journées à chercher des stickers à coller dans mon agenda, des journées à faire des muffins aux carottes qui ne goûtent rien et que les enfants refusent de manger, des journées d’une vidéo de pieuvre qui change de couleur en dormant, des journées à décrire des queues (vous pouvez me demander, c’est un service que j’offre maintenant, la description de vos photos de queues en échange d’argent pour de la vodka), des journées à marcher, à lire, à changer de couleurs de vernir, à commencer un projet, à boire en parlant de commencer un nouveau projet.
Mais cet automne j’ai participé à deux livres qui sont publiés. J’en suis trop fière. Hustling Verses, une anthologie de poèmes de travailleurs.ses du sexe du monde entier. Et Je suis indestructible, un livre-objet d’art, dans lequel je raconte mon agression sexuelle et l’après-agression sexuelle, et aussi toutes les merdes que je suis prête à faire quand je suis en amour.
Depuis deux ans, Je Suis Indestructible propose des soirées Cabaret, avec musique et témoignages de victimes d’agressions sexuelles. Un sujet lourd, mais dont le partage est touchant, rassembleur et permet beaucoup d’espoir. C’est une soirée mots doux demain, le 24 mai, à laquelle je vous convie. Une soirée qui s’éveille comme le printemps, avec une envie de force nouvelle.
J’y lirai, et Natasha Kanapé Fontaine, Roxane Nadeau et La Katiolaise de la Fondation Paroles de femmes aussi. Kutsi Merki y sera pour la musique.
Ce sera au Quai des Brumes, dès 21h. Au plaisir de faire fuck off au silence avec vous!
Le concept de la virginité est hyper injuste: c’est sexiste et hétéronormatif, assez pour faire angoisser une copine qui avait demandé, à sa blonde, durant les années d’école secondaire, si elle resterait toujours vierge vu qu’elle était lesbienne.
J’ai écrit à ce sujet sur Vice. Des amis y ont joyeusement contribué et j’y ajoute aussi des détails croustillants sur l’hymen, qui était d’abord un dieu couronné de fleurs et non une membrane à déflorer.
Extrait: “Une femme doit voir sa vie changer par le frottement d’un pénis contre ses parois vaginales. Soraya, une amie, n’est pas convaincue : « Moi je ne m’en rappelle plus vraiment. Au moins je sais c’était avec qui. » Perdre sa virginité est un acte si mémorable qu’il porte un nom, alors que d’autres événements annonçant un tournant dans la vie de tout le monde n’ont pas de nom véritable. La première fois qu’on fait un pas, la première fois qu’on lit une nouvelle d’Alice Munroe, la première fois qu’on boit un gin-tonic : il n’y a pas de terme qui désigne ces aventures importantes, ni l’idée qu’en goûtant du gin Tanqueray nous perdons quelque chose.
À Canoë, ma chronique est sur ce qu’il ne faut pas dire aux victimes d’agressions sexuelles. Même mon mec se sent trahi parce que je ne lui raconte pas tout en détails, so je trouvais important de tout noter pour conseiller les autres et renvoyer mon mec vers mon texte s’il me redemande une autre fois ce qui s’est passé de la chambre de mes parents à la commode de ma chambre.
Extrait: “Il ne faut jamais minimiser une agression. J’ai déjà dit à une amie, qui était sous le choc de s’être battue avec un agresseur sexuel dans une ruelle qu’un viol, ça n’enlève rien. Qu’un viol, ça ne nous tue pas, qu’on ne nous vole pas une partie de soi-même. Je regrette de lui avoir dit ça. Elle n’avait pas besoin d’un sentiment qui amoindrissait ce qu’elle avait vécu. Il y a 10 000 façons de vivre un viol. Certaines personnes vont sentir qu’effectivement on ne leur vole rien du tout, certaines personnes seront plus en colère qu’anxieuses, et d’autres auront l’impression de ne plus avoir de corps, que leur corps n’est plus le leur, longtemps.”
Et une vidéo et des textes importants à lire pour se déconstruire, ne pas se limiter à une ignorance facile d’enjeux cruciaux et pour mieux comprendre des expressions comme “racisme inversé” et “féminisme blanc”:
Extrait: “Mes parents sont des êtres intelligents. Ce qu’ils voulaient que je comprenne, c’est que je suis noire et que je le serai toujours. Les gens vont pas cesser de me le rappeler. Donc, il fallait que j’en sois consciente. Même si je suis d’ici, ils agiront toujours comme si je viens d’ailleurs.”
Extrait: “C’est dur pour les blancs de confronter la réalité du racisme et les commentaire des gens de couleur sur comment le pouvoir et le privilège fonctionnent, c’est tentant de prendre ces commentaire comme une attaque personnelle et insister que les gens de couleurs sont méchants qui est souvent une tentation de fuire les accusations de racisme inversé.”
Extrait: “The term « white feminism » was coined sometime around that time, by people wishing to distinguish it from intersectional feminism, and has been used as a way to critique some prominent feminists’ tendency to keep treating issues that don’t affect primarily white suburban women as unimportant.”
En page couverture du Devoir du 27 octobre, il y avait l’expression culture du viol entre guillemets. Leur couverture depuis les agressions à l’Université Laval et la dénonciation d’Alice Paquet avait été super intéressante. Mais pourquoi l’expression culture du viol entre guillemets? Est-ce pour diminuer l’importance du phénomène? Est-ce parce que la culture du viol ne leur semble pas le meilleur terme?
Culture du viol. Ça choque. Mais moi ce qui me choque, c’est qu’une femme sur trois se fera agresser sexuellement au Québec.
L’expression est violente car ce qu’elle décrit est violent. L’expression ne devrait pas exister car tout ce qu’elle décrit ne devrait pas exister. #stopcultureduviol
Hier j’étais à Montréal, lors de la mobilisation contre la culture du viol. Avec mes deux enfants. Et des milliers d’autres personnes.
Extrait : « « Je n’avais jamais raconté à personne mon viol. Je ne pensais pas que c’était un viol. Je savais que c’était un viol, mais je me disais que j’inventais peut-être, que j’étais folle. J’ai raconté ce qui m’est arrivé à mon chum la semaine dernière. Il est avec moi. Je sais que je ne suis pas folle et que je ne suis pas seule non plus », m’a dit une participante à la manifestation. » »
Les derniers jours ont été difficiles et c’est nécessaire, d’être confronté à ce qui est est difficile, parce que ça ne peut être ignoré, la culture du viol.
Une manifestation est prévue le 26 octobre à Montréal, et aussi dans plusieurs régions du Québec, pour réclamer la fin de cette culture du viol, une culture de filles de dix ans qui se font traiter de salope dans une cour d’école, sans que les professeurs n’y fassent quoi que ce soit, une culture d’escortes qui se font répéter que ça ne se peut pas, se faire violer si on est payée, une culture de personnes racisées et autochtones qui, plus à risque de se faire agresser sexuellement, portent moins souvent plainte, car après, elles sont accusées de diffamation ou oubliées, désavouées.
La manifestation commencera à 17h30, à la Place Émilie-Gamelin.
J’espère vous croiser à la manifestation, mais j’espère aussi que du beau et du réconfort et des roses en urgence et des safe space, pour tous.
Partenariat avec la Fondation qui permet de sortir une bibliothécaire de l’Espace Jeunes des murs de la BAnQ pour a… twitter.com/i/web/status/1…1 hour ago