Mes lectures du weekend: Nu, un recueil de nouvelles érotiques dirigé par Stéphane Dompierre, Guide des métiers pour les petites filles qui ne veulent pas finir princesses, par Catherine Dufour, et Aimer, materner, jubiler, par Annie Cloutier.
Aimer, materner, jubiler, m’a tellement fait réfléchir que je n’ai pas demandé à mon mec d’écouter le dernier Sons of Anarchy. J’ai lu, avec un marqueur, sans remarquer que je me rongeais les ongles.
“Je continue de me dire féministe parce que le mot continue d’évoquer en moi la subversion, la prise de parole, l’affirmation de soi. Mais d’autres femmes montrent chaque jour qu’il est aujourd’hui possible d’être ce que nous sommes, sans complexe ni culpabilité, et sans béquille idéologique. Alors j’hésite, désormais.” Annie Cloutier
Plusieurs travailleuses du sexe ou ex travailleuses du sexe ne se disent plus féministes. Même si je déteste être vue comme une victime et même si la majorité des féministes refusent de croire en la légitimité du travail du sexe, je me condidérais toujours comme une féministe.
Il a fallu que je lise l’essai d’Annie Cloutier pour douter. Un essai sur la maternité, sur la politique faussement familiale du Québec, sur la pauvreté et sur les choix, les choix de materner et de travailler, les choix de materner et de ne pas travailler. Dans son essai, elle montre que le féminisme, contrairement à ce que plusieurs pensent, n’est pas un humanisme, et il n’est pas, dans son courant principal, prêt à écouter et à croire aux choix de toutes les femmes.
Des féministes m’ont dit que j’étais victime du patriarcat, pour avoir aimé me prostituer. Des féministes m’ont dit que j’inventais, que je mentais, quand je disais que j’avais été pute, et que je n’en étais pas devenue folle après. Des féministes disent que les clients sont violents, terrifiants et qu’ils devraient être jugés comme des criminels.
Et pourtant, je continuais à croire totalement au féminisme. Parce qu’il y a d’autres courants dans le féminisme, il n’y a pas que des femmes qui détestent les femmes qui ne sont pas comme elles, il n’y a pas que des femmes qui refusent la parole à celles qui ne pensent pas comme elles. Il y a le féminisme pro-choix, le féminisme pro-sexe, mais, mais, si le féminisme reste une idéologie et que je n’y souscris pas, puis-je encore être féministe? Ou suis-je maintenant tout simplement une maman, ex escorte, une maman qui aime jouir et faire des muffins aux bleuets? Est-ce que j’ai encore le droit de me dire féministe? Est-ce que j’ai encore l’envie de me dire féministe, même si je suis rejetée par ce qui semble être le courant principal du féminisme?
“I stopped calling myself a feminist several years ago for the simple reason that many feminists don’t like sex workers. I’m sort of the opposite of Groucho Marx: if a club doesn’t want me, then I’m more than happy to chip off elsewhere.” – Brooke Magnanti aka Belle de Jour