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Nuits magiques: des gémissements sous les étoiles

septembre 14, 2023

Hier soir, j’aurais voulu porter une nuisette, achetée une quinzaine de dollars, au Urban Outfitters, au début des années 2000.

Je la portais à mes cours de création littéraire, lors desquels j’ai rencontré Laurie Dupont.

Quand je parle de cette partie de ma vie, j’ajoute souvent que je n’avais pas d’amies. Je marchais en robe bleu nuit, souvent pieds nus dans la rue, mes talons dans les mains, mes cheveux trop bleachés, puis très longs très noirs.

Pendant les cours, je répétais que je connaissais bien les synonymes de mouille, mais que pour moi, la mouille serait toujours la mouille, et non la cyprine. Je n’avais pas un vocabulaire militant ou recherché. J’avais les mots assumés, les cernes de mes nuits sous les yeux, le visage ennuyé et frondeur.

Fast forward des années plus tard, Laurie, ma compagne de classe, m’invite à participer à un collectif qui célébrerait les femmes se réappropriant leurs envies.

J’ai dit oui et comme j’ai appris depuis, tout le monde dit oui à Laurie.

Laurie a le don de rassembler, de chérir et d’encourager les autres, de garder ses rêves près de son cœur, puis de les réaliser. Elle connait des jeux que je ne connais pas, des lits dans lesquels je n’ai jamais touché les draps et les fantasmes comme elle, la force de monter sans (se) laisser tomber.

Le collectif Nuit Magiques était lancé hier soir. J’y étais avec une Guru qui matchait avec mon cardigan, ouvert sur un morceau de lingerie – je ne bois plus, presque plus.

J’ai lu tout le recueil. Il y a des passages sur Berlin, le Lesbian Death Bed, le Shibari, une Camaro, les cunnilingus, la tendresse, les maisons couleur pastel de Miami, de nombreux frissons et gémissements, une fierté, aussi, à écrire ce que certaines n’avaient jamais écrit avant : des désirs et des permissions et des sexualités éclatées. Un espoir pour beaucoup de nuits étoilées.

Que Laurie m’invite, c’était trouver une amie et recevoir en cadeau une reconnaissance que j’ai toujours souhaitée et rarement énoncée : j’écris depuis vingt ans sans me soucier de ce que les autres peuvent penser ou jouir de moi. J’écris pour offrir un modèle que je n’avais pas, quand j’étais plus jeune : celui de suivre sa curiosité, de ne pas regretter des refus ou des envies, et peu à peu, j’écris aussi l’amour, ce qui m’est plus difficile que de détailler les grains de beauté sur mes lèvres.

Dans ce collectif dirigé par Laurie Dupont, mon texte se retrouve parmi d’autres joyaux, composés par Laïma Abouraja Gérald, Rosalie Bonenfant, Valérie Chevalier, Vanessa DL, Théo Dupuis-Carbonneau, Guylaine Guay, Naadei Lyonnais et Florence Nadeau. Sans oublier Laurie, qui (s’)ouvre et ferme le recueil, et qui donnera envie à plusieurs personnes de se vêtir de plaisir plutôt que de pudeur.

Nuits Magiques, publié par KO Éditions. Merci de nous lire.

Ce qu’un escorte lit en pleurant

mars 21, 2019

Maxime Durocher a l’air dix ans plus jeune que son âge et organise parfois des pyjamades dans des hôtels montréalais, avec promesses de pizza et de plaisir. Il est un escorte charismatique, respectueux et il prend souvent la parole comme allié de ses collègues féminines, qui sont plus stigmatisées et criminalisées que lui.

Je ne l’ai jamais entendu dire du mal de quiconque et il garde ses rencontres professionnelles secrètes, comme des joyaux entre lui et la femme qui le convie à passer un bon moment avec elle et du latex.

Sur son site web, il parle de ses services, de son parcours et répond à toutes sortes de questions, comme Is there such a thing as too much foreplay?, What advice would you give men on how to properly worship breasts? et Why is it that men require possession of the remote control?

Juicy_MaximeDurocher_1

Récemment il a posé avec mon livre Juicy. C’est pour moi un honneur et je pense que rien ne me rend plus heureuse que lorsqu’une personne dans l’industrie du sexe apprécie mon livre. Deux autres escortes à ma connaissance ont posé avec Juicy et je trouve ça délicieusement adorable, que de retrouver mes mots tout contre la peau de ceux et celles que j’admire le plus au monde.

Je l’ai questionné sur ses choix et habitudes de lecture, parce que parler cul avec un escorte, c’est moins original que de parler de ce qui l’inspire intellectuellement.

Le livre que tu as plus lu et pourquoi: The Eye of the World. Parce que c’est le premier de ma série favorite par mon auteur favori. Robert Jordan décrit une aventure fantastique avec un niveau de détails qui me captive.

Ce que tu lis présentement: Wikipédia, sur l’Égypte ancienne.

Un livre que tu donnes en cadeau: Luttes XXX. Parce que ça décrit tellement bien la lutte pour les droits des travailleuses/eurs du sexe ainsi que son fondement.

Un livre qui t’a fait pleurer: Le Seigneur des anneaux.

Tes habitudes de lecture: Avant de me coucher, juste après ma douche, après mon somnifère et mon antidépresseur. Ça m’aide à me relaxer et à m’assoupir.

Demain je vais lire des mots cochons

mars 14, 2018

photo par Edwar Noize

Le Festival Dans ta tête organise une soirée de poésie et j’y ai été invitée. Je suis très triste de ne plus écrire de la poésie. Avant j’écrivais sur les seins de Victoria Beckham/ les filles de Ciudad Juarez/ tous les mecs qui m’ont demandé de leur dire je t’aime quand ils venaient juste de me lécher devant une émission des Simpsons dans une villa mexicaine. J’écrivais aussi sur les céréales Alphabits. Je n’écris plus de poésie mais peut-être qu’un jour je recommencerai.

Demain je vais lire un extrait de Juicy. Je ne sais pas encore comment je serai habillée ni si je porterai une perruque.

C’est au Vitrola, dès 20h, au 4602 rue Saint-Laurent.

Tout ceux impliqués là-dedans sont assez géniaux pour que vous braviez tempête de neige/mercredi soir/drame existentiel : Rosalie Asselin, Emmanuel Deraps, Jean-Guy Forget, Loriane Guay, Emmanuelle Riendeau, Stéphanie Roussel, Carole David, Marie Darsigny, Mélanie Jannard, Daniel Leblanc-Poirier, Jean-Christophe Réhel, Mathieu Renaud, Mathieu Arsenault, Frédéric Dumont et VioleTT Pi.

Voici comment Emmanuel Deraps décrit la soirée :

« show excès friendly

à jeun ou imbibé·es

les troubles-fêtes des événements mondains

la dégénérescence de la poésie de ruelle

givrée des deux versants de la page

l’excitation en prime

vous a dégoté

un bouquet de prestations

fraiches et ravissantes

indélébiles »